Le Labyrinthe
À travers le temps, ils sont quelques dizaines a avoir échappé à l’intolérance. De la répression de l’inquisition pour pratique de sorcellerie, à l’incompréhension forcenée de dévots superstitieux, ils sont les témoins silencieux de nos errances intérieures. Pourtant, dans sa quête, l’homme a toujours été troublé par leur mystère. Et ce rite païen, profondément ancré dans nos gènes, et semblant issu de l’aube de l’humanité, nous propose toujours de relever le même défi.
Un labyrinthe, habituellement, est un lieu où de multiples chemins s’offrent à nous. Chaque voie ressemble aux autres et forcement, nous nous perdons. Alors nous essayons de l’explorer méthodiquement pour en trouver l’issue, ou pour nous égarer plus encore ! Notre intelligence étant piquée au vif, nous concevons une stratégie très élaborée, qui forcement, nous rendra vainqueurs. À moins qu’après être passé trois ou quatre fois au même endroit, le doute ne s’installe. Nous imaginons une autre tactique basée, pourquoi pas, sur l’inverse de ce qu’il paraît logique de faire. Puis, de guerre lasse, fort de nos insuccès et le mental hors service, nous errons sans plus penser à rien. Là, dans cet état d’esprit où l’humilité prévaut, nous atteignons la sortie, tout étonné d’avoir pénétré le mystère du labyrinthe, sans même l’avoir saisi !
Le labyrinthe semble agir comme le reflet de nos méandres intérieurs. De fausses routes en cul-de-sac, de dérisoires certitudes en véritable ignorance, nous tentons de nous frayer chemin jusqu’à la délivrance.
Pour Chartres, c’est bien différent et semblable à la fois. Car ici pas de dédale, et une seule voie s’offre à notre cheminement. Quel est donc ce curieux labyrinthe à voie unique, et clairement tracé sur le sol de surcroît ?
Nous sommes véritablement dans notre labyrinthe intérieur, aux possibilités infinies. Celui dont tous les chemins mènent à Rome, et où pourtant il est des voies courtes, et d’autres longues.
Alors que nous progressons sur les dalles blanches de cet étrange parcours, tout notre être tendu vers le divin, combien de pensées interlopes, de doutes fougueux et de révoltes insensées vont décourager notre quête vers l’absolu, comme autant d’impasses dans notre labyrinthe intérieur.
C’est le moment d’entrer en obéissance au sentier, d’accepter le jaillissement de notre lumière, autant que les turpitudes de nos ténèbres. Simplement obéir. Obéir au chemin, pas à pas. Voir toutes les manifestations de la vie, en nous et autour de nous. Et progresser quand même. Encore. Toujours. Jusqu’au bout.
© Roland Lagoutte septembre 1995